Aujourd’hui, c’est notre dernier jour avant le grand départ. Nous projetons de l’occuper par la visite du site d’Épidaure, situé à environ 150 kilomètres d’Athènes. Un bus permet de rallier la capitale à Epidaure, en faisant un changement à Nauplie.
La veille, nous sommes couchés vers 3 heures du matin du fait de notre retour épique du Pirée et nous nous levons, un peu difficilement il faut l’avouer, à 8 heures, le temps de prendre un bus urbain qui nous mènera à l’une des deux gares routières d’Athènes.
Une fois arrivés, nous prenons nos billets de bus et demandons à la vendeuse où s’arrêter exactement et à quelle heure est le bus du retour. Elle est bien en peine de nous répondre: il faudra demander au chauffeur.
Lui-même ne sait pas trop, et nous conseille de demander à la gare routière de Nauplie, là où nous ferons un changement de bus pour nous rendre à Epidaure. Nous partons et profitons de ces quelques heures de route pour nous reposer.
Nous arrivons à Nauplie, très différente d’Athènes : la ville est très moderne, très européenne, nous avons l’impression de nous trouver dans une ville du sud de la France ou de l’Espagne. Nous demandons les horaires de bus retour à partir d’Épidaure à la dame de la gare routière qui nous donne un prospectus offrant les horaires.
Nous sommes rassurés car un bus part du site d’Épidaure dans quelques heures, ce sera le dernier de la journée : ce laps de temps nous permettra de mener notre visite à bien, tranquillement. Nous déjeunons dans un petit bouge en attendant notre prochain bus qui nous conduira sur le site.
Dès qu’il arrive, nous demandons au chauffeur si le bus retour part bien du site à l’heure indiquée sur le prospectus, ce qu’il nous confirme. Notre visite peut donc commencer sereinement.
Le théâtre d’Épidaure
Nous commençons notre visite par le théâtre, qui se dresse face à nous à flanc de colline. Son état de conservation est extraordinaire car il a été excavé au XXème siècle seulement, ce qui ‘a préservé des séismes et de l’érosion.
Nous gravissons les gradins afin de bénéficier d’une vue qui surplombe le théâtre et ses alentours: c’est époustouflant.
Au centre de l’orchestra, nous testons l’acoustique du lieu : les architectes construisaient ces édifices à flanc de montagne de façon à ce que la topographie du lieu devienne une caisse de résonance efficace.
De plus, chaque acteur portait un masque dans lequel se trouvait glissé un porte-voix, qui amplifiait les sons pour atteindre la partie haute des gradins. Mais le masque permettait aussi d’identifier chaque personnage de la pièce, et ce, même de loin.
En effet, les théâtres antiques étaient destinés à accueillir des représentations théâtrales de tragédies ou de comédies, dans le cadre des Dionysies, concours religieux organisés par la cité. Tous les citoyens étaient conviés à ces représentations et bénéficiaient même d’un petit salaire, le misthos, destiné à couvrir les frais d’entrée au théâtre.
L’enjeu de ces représentations était civique : la cité fédérait les citoyens autour des mythes et de l’histoire nationale, mais elles revêtaient aussi une dimension religieuse puisque venir au théâtre, c’était accomplir un rite en l’honneur de Dionysos.
D’ailleurs, avant chaque représentation, on sacrifiait sur l’autel destiné aux libations un bouc, l’animal de Dionysos par excellence. Le mot “tragédie” tiendrait son étymologie de cette pratique puisque “tragos” signifie “le bouc” et “odos” réfère au chant, c’est-à-dire au cri du bouc avant de mourir.
Sanctuaire d’Asclépios en Epidaure
La suite de notre visite se déroule au sanctuaire d’Asclépios : il fait très chaud et il y a peu d’ombre parmi les ruines.
On distingue cependant encore très bien les différents lieux de ce sanctuaire dédié au dieu de la médecine Asclépios.
Il s’agit d’un véritable complexe médical et religieux qu’on pourrait presque comparer aujourd’hui à un centre de remise en forme : les visiteurs pouvaient venir de tout le monde grec-toutes cités confondues- afin de s’offrir une petite cure. L’on payait un droit d’entrée et on avait accès ensuite à l’ensemble des équipements: stade, palestre, hôtellerie et salle à manger commune (hestiatorion).
L’Hestiatorion:
Le stade:
La dimension religieuse de la visite au sanctuaire était elle aussi capitale : le visiteur venait pour guérir ses maux et faisait appel aux médecins présents, mais aussi au dieu Asclépios pour l’y aider.
Pour cela, il commençait par faire des libations dans le temple dédié au dieu dont quelques colonnes sont encore debout.
Puis, le malade devait passer une nuit dans l’abaton (le lieu où l’on ne pénètre pas) appelé aussi enkoimétérion (le lieu où l’on est couché): il dormait à même le sol et le dieu venait lui rendre visite en rêve au cours de la nuit.
Le rituel était encadré par des médecins et prêtres oniromanciens qui interprétaient les rêves et prescrivaient des remèdes. Un bas-relief que l’on peut admirer dans l’abaton illustre cette pratique.
La particularité de ce sanctuaire d’Asclépios à Epidaure réside dans la présence de ce temple circulaire, tout près de la chambre d’incubation, appelé la Tholos ou Thymélè: son architecture circulaire est surmontée d’un dôme tripartite et ses murs extérieurs étaient ornés de reliefs. En son centre, se trouvait une dalle mobile donnant accès au sous-sols.
La fonction de ce temple reste aujourd’hui énigmatique et a fait couler beaucoup d’encre chez les spécialistes de la question : maison symbolique d’Asclépios, endroit où étaient conservés des serpents, symboles du dieu guérisseur ?
Nous trouvons passionnant de nous promener dans un endroit encore aujourd’hui bercé de tant de mystères.
Un peu plus loin, à l’époque romaine, a été construit un temple en l’honneur d’Hygie, la fille d’Asclépios. Son nom est à l’origine du mot français “hygiène” et des mots de cette famille.
Les sanctuaires en l’honneur d’Asclépios, organisés peu ou prou sur le modèle de celui d’Epidaure ont fleuri dans le monde antique : à titre d’exemple, l’Asclépeion de Pergame, en Turquie, est extrêmement bien conservé et offre un spectacle saisissant.
Un retour épique
Notre visite achevée, nous prenons le temps d’une petite bière pour nous reposer et attendre notre bus. Le temps passe, et nous bavardons un peu avec le barman. Au fil de la conversation, nous lui expliquons que nous attendons notre bus.
Là, il s’étonne:
– Quel bus ?
– Le bus qui part du site pour rejoindre Athènes !
– Mais il n’y a pas de bus pour rejoindre Athènes qui part d’ici !
– Mais il y a bien un bus pour Athènes, non ?
– Oui, il part d’une station service au bord de la route à 3 kilomètres d’ici. Mais il faut vous dépêcher, car il part bientôt ! Vous n’y serez jamais en marchant, je vous conseille de prendre un taxi tout se suite.
Nous ne savons pas quoi faire face à ces informations contradictoires. Dans le doute, nous hélons un taxi et lui demandons de nous déposer à la station service ont parlait le tenancier. Le taxi nous prend et nous largue quelques kilomètres plus loin, au bord d’une route déserte, où en effet, se trouvent une station service isolée et un arbre.
Nous n’avons plus qu’à attendre un bus, qui peut être est déjà passé. Aucun véhicule ne passe durant plusieurs longues minutes. L’inquiétude monte en nous, car nous avons notre vol pour la France le lendemain matin et pour le moment, nous sommes à 150 kilomètres d’Athènes, à pieds.
Nous allons voir si il y a âme qui vive à la station. L’homme nous explique que l’arrêt de bus est bien là, mais qu’il ne sait pas si le bus est déjà passé ou non.
Nous attendons au pied de l’arbre.
Nous attendons toujours lorsqu’un bus passe sur une route perpendiculaire à celle au bord de laquelle nous attendons : nous courons à sa rencontre, le hélons de loin, l’arrêtons, courons jusqu’à lui. Le chauffeur nous indique qu’il ne va pas à Athènes.
Nous retournons dépités à notre arbre et attendons. Il n’y a pas âme qui vive, aucune voiture ne passe, nous sommes seuls et de plus en plus inquiets. Le bus n’était-il pas sur le site ?
Tout à coup, au loin, sur la route de montagne, on discerne une vieille carlingue métallique scintillant au soleil : un bus va passer sur notre route et l’espoir renaît. Nous le hélons et il va bien vers Athènes ! Le hic, est qu’il est bondé et qu’il ne reste aucune place assise.
Nous sommes condamnés à passer 3 heures sur des routes de montagnes sinueuse debout dans la travée centrale, accrochés à un siège pour ne pas tomber. Mais face aux émotions que nous avons vécues, nous en sommes ravis !
Quelques temps plus tard, au détour d’un virage, attend un jeune couple, qui hèle le bus à son tour. Le chauffeur ne s’arrête pas et laisse ces jeunes dans la détresse. C’eût pu être nous !
Nous rejoignons Athènes sans encombre, soulagés et heureux de notre journée.
Le lendemain, nous rejoignons l’aéroport vers 8 heures pour avoir assez d’avance : chat échaudé craint l’eau froide ! Nous avons un peu de temps devant nous et petit-déjeunons au McDonald’s de l’aéroport : nous sommes prêts à rentrer.
Arrivés à Paris Charles de Gaulle, nous prenons l’Orly Bus pour rejoindre notre point de rendez-vous Blablacar. Cela a été le moment le plus dur du voyage : deux personnes qui se querellent, le ton monte et le chauffeur du bus est obligé de stopper le bus et d’appeler la sécurité afin de restaurer un semblant de calme et d’éviter l’empoignade et les coups. Ce retour à la réalité détonne avec le calme et la sérénité que nous avons ressentie en Grèce durant notre séjour.
Notre chauffeuse Blablacar est d’une extrême gentillesse, tout comme son chien chinois avec une frange blonde (!). Précisons tout de même qu’à la vue du chien, Cécile propose de le mettre dans le coffre pour la route, sous le regard interdit – voire assassin -, de sa propriétaire. J’ai bien cru que nous allions rester sur le bord de la route (bis repetita).
Synopsis » La Grèce et les Cyclades
- La Grèce et les Cyclades : Paris – Athènes
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- Visite de Delphes
- Les Cyclades : l’île de Sifnos
- Les Cyclades : l’île de Milos
- Visite du théâtre d’Épidaure et du sanctuaire d’Asclépios