Avant à la Poste, on attendait à la queue-leu-leu, en silence. Maintenant à la Poste, on attend toujours à la queue-leu-leu mais en plus on attrape un tortis-colis à essayer de regarder l’énorme écran plat qui diffuse des séries débiles sous-titrées. Le progrès pour moi aurait plutôt été de ne pas investir dans un écran plat mais d’embaucher une personne supplémentaire pour réduire ces temps d’attente hallucinants…
Mon écran Hyundai 19″ (L90D+) vient de me claquer entre les doigts. En fait, non, il n’a pas véritablement claqué mais il est inutilisable : il s’arrête après deux secondes d’affichage et un bref grésillement.
Inutilisable donc. Et comme il était garanti 3 ans sur site, j’ai voulu faire jouer la garantie.
Il est extrêmement rare que j’aie recours à un service après vente, surtout pour du matériel informatique. Et c’est bien le premier écran depuis 1992 (j’ai commencé avec un 14″ !) qui est complètement inutilisable.
J’ai eu des écrans brûlés, dont l’image devenait sacrément verte mais jamais d’écran noir. Et bien, voilà, c’est fait.
Me voilà encore à la poste. Quelle joie. La file d’attente s’étire à perte de vue. Je soupire. Ça va être long. Très long.
Je regarde ma montre. 14h05. J’ai cours à 15h. Ça devrait le faire. Enfin, j’espère.
Les minutes passent. La file n’avance pas. Je m’impatiente. Mon imagination s’emballe.
Et si je bousculais tout le monde ? Non, mauvaise idée. Trop risqué. Trop brutal.
Ah, j’ai trouvé ! Je vais faire semblant de m’évanouir. Ça marchera à coup sûr. On me portera jusqu’au guichet.
Mais non. C’est ridicule. Je ne suis pas acteur. On va me démasquer.
14h20. Toujours pas avancé d’un pouce. Je commence à stresser. Mon rendez-vous…
J’observe les autres clients. Ils ont l’air résignés. Moi, je bouillonne intérieurement.
Et si je simulais une urgence ? “Laissez-moi passer, ma femme accouche !” Mais je suis célibataire. Zut.
14h30. La file bouge enfin. D’un mètre. Youpi. À ce rythme, j’y serai demain.
Je m’imagine en train de grimper sur les épaules des gens. Tel Tarzan dans la jungle postale. Ou Crocodile Dundee.
Ou alors, je pourrais me déguiser en facteur. Personne ne me remarquerait. Je passerais incognito.
14h40. Je commence à avoir des sueurs froides. Mon rendez-vous approche. La file, elle, n’avance pas.
Je fantasme sur un toboggan géant. Il me propulserait directement au guichet. Quel pied ce serait !
Ou alors, un trampoline ? Je rebondirais par-dessus tout le monde. Élégant et efficace.
14h50. Panique à bord. Je ne vais jamais y arriver. Je vais rater mon rendez-vous.
Je m’imagine en train de crier : “Il y a une bombe !” Tout le monde fuirait. Sauf moi. Non, trop extrême.
Et si je lâchais un animal sauvage dans la poste ? Un tigre, par exemple. Ça ferait de la place.
14h55. Miracle ! Je suis presque arrivé. Plus que trois personnes devant moi.
Je reprends espoir. Mes fantasmes s’estompent. Je redeviens un citoyen normal et poli.
15h00. C’est mon tour ! Je bondis au guichet. Victoire !
“Bonjour, que puis-je faire pour vous ?” me demande l’employée.
Je la regarde, hébété. J’ai presque oublié pourquoi j’étais venu.
L’attente à la poste, c’est toute une aventure. Une épopée moderne. Un défi quotidien.
On y entre plein d’espoir. On en ressort… différent. Parfois vidé. Parfois victorieux.
Mais une chose est sûre : on en ressort toujours avec des histoires à raconter. Et des fantasmes inavoués.
Alors la prochaine fois que vous irez à la poste, souvenez-vous. Vous n’êtes pas seul dans cette galère.
Et qui sait ? Peut-être croiserez-vous un client à l’imagination débordante. Comme moi.
En attendant, je file. J’ai un cours à donner. Enfin, j’espère qu’ils m’auront attendu…
C’est l’automne ! Des feuilles qui jonchent les trottoirs, des giboulées grosses comme des billes qui crépitent sur la terrasse pendant dix bonnes minutes, un ciel de plomb réminiscent des derniers jours de l’Apocalypse, des élèves qui tremblotent à cause des radiateurs éteints… C’est triste, c’est l’automne.
Dîtes, une question me taraude : pourquoi est-ce que le facteur ne sonne jamais lorsqu’il délivre un colis ?!?
A chaque fois, c’est le même refrain : je suis à la maison, j’attends le colis et cet #!?@& de facteur me glisse un mot du style “ne vous déplacez pas, je repasse demain !”.
C’est bien gentil coco mais demain je ne serai pas là. Aujourd’hui j’y étais par contre !
Il paraît que le facteur sonne toujours deux fois – mais seulement lors de sa deuxième visite alors ?